Séance inaugurale du CG94, intervention D.Breuiller du groupe Gauche Citoyenne EELV
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Intervention de Daniel Breuiller

Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, chers collègues,

Alors que nous venons d’élire notre nouveau président du Conseil général, je souhaite revenir sur la campagne qui vient de s’achever, expliquer pourquoi, Monsieur le Président, vous avez eu le soutien du groupe Gauche citoyenne Europe Ecologie Les verts et dire nos attentes pour notre département.

Tout d’abord, je voudrais saluer et féliciter les nouveaux élus. Je me rappelle une intervention du Président Nelson Mandela s’adressant aux parlementaires en leur disant « n’oubliez jamais qui vous a élu et pourquoi ».

Pour notre groupe, cela s’appelle le refus des injustices, des discriminations, des inégalités sociales et territoriales, l’exigence de ne pas seulement dénoncer mais de trouver des réponses concrètes, de nouvelles politiques publiques.

La nécessité de répondre aux défis que la crise climatique ouvre, ceux que le drame du Japon  rend si évidents, quand la décision d’un seul pays peut mettre des millions d’hommes en péril sur tous les continents, la volonté aussi de répondre à la crise démocratique profonde que connait notre pays et qui s‘aggrave d’année en année comme en témoignent la montée de l’abstention et celle du Front National.

  • o Une nouvelle fois, le record des abstentions est battu. On pourrait trouver bien des raisons mais ne nous voilons pas la face, cette abstention record est également la traduction d’une perte de confiance de beaucoup de nos concitoyens à notre égard, toutes couleurs politiques confondues.

C. Favier m’a confié dans le mandat précédent une délégation à la démocratie  participative, sans doute parce que nous partagions l’idée essentielle mais malmenée que la politique appartient à tout le monde et qu’elle a besoin de tous ses citoyens, ceux qui ont voté et ceux qui ne votent plus, ceux qui ont le droit de vote et ceux qui ne l’ont pas et qui nous l’espérons l’auront demain.

C’est peut être en raison de cette délégation et de cette conviction que je ressens durement cette abstention comme un constat d’échec.

Et bien qu’ayant obtenu 44,66% de voix au premier tour, un score en hausse  de plus de 6% sur 2004, bien qu’appartenant à la seule formation politique de la gauche ayant gagné des voix au plan départemental et national, je ne me réjouis pas.

  • A nouveau le Front national s’approche de hauteurs inégalées. Là encore quel dirigeant républicain pourrait ne pas s’interroger sur les causes de ce résultat.Lorsque des ministres de la République dérapent comme l’on fait MM. Hortefeux ou Guéant, lorsque pour « séduire l’électorat (du FN), on installe les débats publics sur le terrain qui est le sien, celui des  peurs, de la méfiance vis à vis de l’étranger, du rejet des ROMS ou des Sans papiers ou de l’homophobie, on fait le lit du FN. Que son score soit plus où moins élevé devient secondaire car ce sont ses idées qui progressent !

  • Dans cette catastrophe civique, la gauche s’en sort bien, électoralement parlant mais c’est un succès qui peut s’avérer un trompe l’œil. Le rejet du sarkozysme a été plus fort que l’adhésion à une alternative et finalement les électeurs si peu nombreux ont plutôt donné une prime aux sortants, dès lors que leur action avait été visible. Ils ont montré leur attente de protection sociale et d’écologie.

Je félicite le Front de Gauche de son résultat. La gauche a besoin de toutes ses composantes pour permettre l’alternative que nos concitoyens espèrent. Votre choix d’affirmer la volonté d’un rassemblement et l’arrivée du parti de Gauche ont créé une dynamique utile aux yeux de votre électorat.

Je regrette cependant que cette dynamique fructueuse ait été entachée par la résurgence de comportements inacceptables et guère républicains.

Je veux condamner dans cette enceinte les violences commises à Ivry sur Seine, par deux « décolleurs d’affiches » contre une militante d’EELV, les insultes réitérées à Valenton, Villeneuve Saint Georges contre Xavier Cantat, le traitant de « frère d’assassin » et maculant ses affiches de peinture rouge. Ces comportements insuffisamment dénoncés ne sont pas dignes de nos valeurs.

Je veux dans une autre registre regretter les candidatures spontanées d’écologistes maison, l’usage abusif du logo « majorité de gauche Val de Marne » et l’agressivité envers mon ami et collègue Jacques Perreux à qui certains veulent depuis qu’il a quitté le groupe communiste « faire payer ses choix ».

Je veux enfin vous dire, chers collègues, à quel point j’ai été blessé personnellement par les déclarations de certains dirigeants dont laurence Cohen me traitant de faux cul et d’hypocrite et mettant en doute le soutien pourtant réaffirmé publiquement à C. Favier pour la présidence du conseil général.

Au lieu d’appuyer un engagement politique pour la diversité de la gauche et un engagement fraternel pour un président communiste qui avait fait la preuve de sa capacité à rassembler et à travailler avec toutes les composantes de la gauche, quelques uns ont cherché à décrédibiliser notre parole. Il n’y a pas loin entre les « faux cul » et les « tous pourris ». Pour nous la parole publique est importante et elle nous engage vis-à-vis de nos concitoyens. C’est pourquoi nous avons voté pour vous Monsieur le Président.

Je voudrais pour conclure ce sujet dire à nouveau mon regret que nous n’ayons pas signé en décembre un accord à trois et livrer mon analyse de cet échec. La demande d’Europe écologie les verts, d’être chefs de file de la Gauche sur 2 cantons de gauche où un sortant PS et un sortant PC ne se représentaient pas n’était pas une manœuvre politicienne mais simplement l’exigence que la diversité de la gauche, mise à mal par un mode de scrutin injuste, puisse être solidairement assumée.

C’est tellement compréhensible que dans d’autres départements, des communistes, bien que minoritaires sont candidats de rassemblement de la gauche avec l’appui d’écologistes ou de socialistes

Le choix de cet accord à trois n’était pas facile. La position  communiste (un accord seulement sur les cantons de droite) n’était pas inacceptable. Nous avions dit que cela ne permettrait pas de garantir un minimum de rééquilibrage et de représentation des écologistes. Nous avions hélas raison, puisqu’en dépit du désistement réciproque de toute la gauche, nous n’avons gagné aucun canton sur la droite.

Notre demande d’un accord sur un canton de gauche où le sortant ne se représentait pas n’était pas non plus inacceptable. Lorsque l’on condamne le manque d’équité d’un mode de scrutin électoral qui minore les plus petites formations politiques, on peut trouver un accord pour compenser cette injustice et ne pas se contenter de la dénoncer à la tribune de l’assemblée nationale.

Avec 20,8% d’électeurs le Front de Gauche a donc 18 élus.

Avec 16% d’électeurs le Parti socialiste / MRC a donc 10 élus.

Avec 14% d’électeurs Europe Ecologie Les Verts/Gauche citoyenne a 3 élus.

Le parti communiste a souvent dénoncé sa sous représentation à l’assemblée nationale en comptant le nombre d’électeurs nécessaires pour avoir un député. Il en va de  même  ici pour les écologistes.  1 élu pour 1550 électeurs PC, 1 élu pour 2000 électeurs socialistes, 1 élu pour 6000 électeurs écologistes et citoyens quant à l’exécutif….. =   1 FDG pour 2500 électeurs

1 PS/MRC pour 4000

0 EE/GC pour 18000…

J’attends avec inquiétude les prochaines échéances électorales présidentielles et législatives si toutes les familles de la gauche considèrent que chacun doit aller au premier tour sous ses couleurs, sans se préoccuper de dynamique collective. Le Front de Gauche et Europe Ecologie les Verts seront marginalisés au premier tour  de la présidentielle face à la crainte d’un nouveau 21 avril et pourtant l’apport à une dynamique politique des courants de la radicalité et de l’écologie politique demeureront essentiels, au-delà d’un résultat électoral, à la mise en œuvre de politiques publiques alternatives au libéralisme actuel.

Oui la diversité de la gauche est nécessaire, c’est même une condition de son développement et de ses réussites futures si elle se marie avec l’acceptation de travailler ensemble et le respect (qui n’exclut pas la franchise) des priorités de ses alliés.

Oui notre diversité est notre chance et elle est amputée aujourd’hui puisque le mode de scrutin et les électeurs n’ont pas permis qu’un nouvel élu écologiste ne siège dans notre assemblée.

Chers collègues, on ne fait pas d’écologie sans écologiste.

Que dire  alors, Monsieur le Président, de votre décision d’exclure les élus écologistes de l’exécutif. Vous m’en avez informé mardi, alors que président du groupe Gauche citoyenne Europe écologie les Verts, je venais vous rencontrer pour évoquer les modalités de travail en commun et nos propositions programmatiques.

Vous l’avez fait en présence de Pascal Savoldelli, président du groupe communiste. J’ai connu le président ouvert et rassembleur durant 7 ans, au coté duquel nous avons eu plaisir à travailler. Il serait catastrophique pour le Val-de-marne qu’il devienne un président chef de parti.

Je vous l’ai dit, votre décision est mauvaise pour la démocratie et pour le département.

2 choses fondamentales ont différencié dans le passé le Val de Marne et la Seine Saint Denis, deux départements dont le président était communiste.

–       la personnalité du président ouvert au dialogue sans sectarisme

–       et le fait qu’en Val de Marne votre formation politique n’a jamais eu de majorité seule. Ce pluralisme a été le meilleur rempart contre les dérives qu’a connu la Seine Saint Denis

Je vous le dis solennellement, Monsieur le Président, ne faites pas du Val de Marne l’ancienne Seine Saint Denis par un repli sur soi du Parti communiste et le retour aux travers que nous avons hélas connu avec la mise à l’écart et l’ opprobre jetée sur Gaston Viens puis plus tard sur Marcel Trigon et tant d’autres dirigeants.

J’ai grandi dans la culture communiste. Je sais la beauté de l’idéal des partageux, la générosité des militants qui refusent les injustices sociales, la toute puissance de l’argent, capable de lutter hier contre l’impérialisme, aujourd’hui contre une mondialisation ultralibérale. Je sais la beauté du mot « commun », je sais hélas aussi comment dans la culture communiste, la tentation du sectarisme, la certitude d’avoir raison contre tous peuvent entrainer loin de ces idéaux.

La fin ne justifie pas les moyens.

L’exclusion que vous prononcez à notre égard satisfera j’en suis certain, les plus sectaires de vos camarades.

Elle affaiblira pourtant durablement ce que vous représentez et incarnez.

Je redis donc devant l’assemblée départementale notre volonté de travailler dans la majorité et au sein de l’exécutif et d’apporter notre contribution aux politiques publiques nécessaires. Il n’y a aucun refus d’aucun de nous 3, simplement le souhait que ce ne soit pas le groupe communiste qui désigne les représentants de notre groupe.

Les départements sont en crise, sous l’effet de l’asphyxie financière imposée par le gouvernement et de la crise sociale qui est au cœur de leur action.

Les salariés sont troublés par la remise en cause du sens de leur travail par ces crises.

Ne vous privez pas d’élus qui savent chercher intensément les réponses nouvelles que la crise écologique, démocratique et sociale appelle.

Alors que la catastrophe japonaise met en exergue le risque nucléaire, il est sain et utile que des militants et des élus, exigent un débat national sur ce sujet et pourquoi pas une décision politique référendaire car le nucléaire n’est pas une question technique mais bien un choix politique. Ce sont les élus EELV (et PG) qui portent cette exigence mais elle nous sera utile a tous car la gauche ca doit être l’exigence du débat et de l’intelligence

Non le drame nucléaire n’est pas que la simple conséquence de l’ultra libéralisme, c’en est une des causes bien sur, mais Tchernobyl  n’était ni au japon, ni aux USA, ni en France.

– Alors que la crise climatique s’aggrave, il est nécessaire de développer une structure publique des énergies renouvelables,

Il faut bien sur aider les plus démunis à travers des bons EDF ou gaz dont les montants explosent mais il faut surtout isoler les logements sociaux comme les logements privés, réduire leur consommation d’énergie, prévenir plutôt que guérir. Vous vous étiez voilà 3 ans engagé pour une structure publique de géothermie, elle n’a pas vu le jour. La région, sur proposition des écologistes, la crée ; engageons le département aux cotés des autres collectivités dans cette structure.

– Alors que la mal-bouffe frappe les plus pauvres et que notre système de production agricole intensive et d’élevage empoisonne les sols, les plages bretonnes et parfois les hommes, il est utile de travailler avec ceux qui réfléchissent à ces questions depuis des années et ouvrent des perspectives en soutenant les circuits courts, le bio dans les cantines,… On peut aider à l’installation de l’agriculture bio en Ile de France. Au lieu de continuer à faire d’énormes tuyaux pour récupérer les eaux pluviales et d’énormes usines de traitement, réalisons le projet innovant du ru de la Lande à Champigny auquel nous nous sommes engagés devant une commission de débat public, et que nos cadres ont élaboré avec compétence et qui semble remis en cause.

– Alors que la pollution atmosphérique diminue notre espérance de vie et qu’un enfant sur deux souffre d’asthme, il est nécessaire de confronter les réflexions sur l’aménagement du territoire et sur les déplacements..

J’ai grandi dans la certitude que le productivisme et la croissance garantiraient la réduction des inégalités et le mieux-vivre, force est de constater qu’il n’en est rien.

Je suis devenu écologiste en constatant ces difficultés grandissantes : Picasso était allé au communisme comme on va à la fontaine, je pourrai en dire autant de l’écologie politique.

Cette écologie politique n’est pas la propriété d’Europe Ecologie les Verts, la preuve par notre groupe, mais nulle part ne se mènent des politiques écologiques lorsque les écologistes n’y sont pas associés.

Je dirais la même chose des démarches citoyennes et des enjeux d’une démocratie ouverte et non partisane.

Non pas une démocratie des citoyens, contre les partis ou contre les institutions mais une démocratie qui décide de faire avec les citoyens plutôt qu’en leur nom.

Gauche Citoyenne par ses mouvements locaux porte ces exigences dans 10 villes et au sein de notre département.

Mettons en œuvre le droit d’interpellation de notre assemblée par une pétition de quelques centaines ou milliers de citoyens comme je l’ai proposé sans succès dans la mandature précédente.

Poursuivons ce travail de fourmi que vous avez rendu possible avec l’adoption de la charte de la participation pour permettre que l’on regarde par exemple les Rmistes comme des citoyens et non pas des usagers. Et puis il y a tant de dossiers à porter en commun, droit à la santé et défense de l’hôpital, droit à l’éducation, réforme de la dépendance, logement, développement de la recherche, insertion, culture, sport, solidarité internationale,…

La crise que traverse notre pays est profonde. Le président Sarkozy a par sa politique et ses attitudes affaibli notre pays.

Les val de marnais comme beaucoup de français attendent de la gauche et des écologistes qu’ils ouvrent une perspective et une alternative.

A 15 mois de l’élection présidentielle vous décidez d’interdire à 14% de citoyens l’accès à l’exécutif départemental de leurs représentants. C’est une faute politique. Un tel exécutif amputé serait un recul de 30 ans.

Nous avons été élus pour apporter à nos concitoyens notre travail et notre réflexion. Nous le ferons, même si vous nous excluez de l’exécutif. Le Val de Marne deviendra alors non pas le symbole de l’ouverture et de l’intelligence partagée comme ORBIVAL, le festival de l’Oh, la charte de la participation et bien d’autres actions l’ont montré, mais le symbole de la fermeture et du rejet d’une partie de la population.

Encore à cette heure, nous sommes nombreux dans cette assemblée, dans ce département, et jusque parmi vos électeurs à ne pas parvenir à y croire.

Nous ne tomberons pas dans la contestation stérile. Nous restons membres de la majorité. Avec Christine Janodet et Jacques Perreux, et avec d’autres, nous initierons un forum social de l’écologie où tous les citoyens, responsables associatifs, syndicalistes, militants politiques, pourront contribuer au futur de notre département, et inventer un nouveau rapport à l’institution.