Pour une politique familiale écologiste !
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Tribune publiée sur le HuffingtonPost

Il y a quelques semaines, le gouvernement rouvrait le débat sur le financement de sa politique familiale dans un contexte budgétaire difficile. En effet, la branche famille de la sécurité sociale, qui pèse 53 milliards d’euros en 2011, (soit 17 % du budget total) enregistrait en 2012 un déficit de 4,8 milliards d’euros. Ce déficit est un signe supplémentaire de la nécessité de réformer en profondeur la politique familiale française.

Depuis sa mise en œuvre au sortir de la guerre, cette politique est en effet devenue inefficace et inégalitaire. En plus d’avoir au final peu d’incidence sur la natalité, elle ne protège pas les plus fragiles. Un tiers de familles monoparentales (contre 13 % pour l’ensemble de la population) et près de 3 millions d’enfants ou de jeunes de moins de 18 ans vivent sous le seuil de pauvreté.

Cette situation inacceptable marque la nécessité de sortir du modèle traditionnel et nataliste des politiques familiales actuelles. L’annonce par Jean-Marc Ayrault de la baisse du plafond du quotient familial est un premier pas vers une politique familiale plus juste socialement. Néanmoins, pour les écologistes, il est possible, dès maintenant, d’aller plus loin en supprimant ce fameux quotient familial, dont la majeure partie de son coût, 15 milliards d’euros, bénéficie avant tout aux 10% des familles les plus riches. En contrepartie, les allocations pourraient être revues pour être ouvertes dès le premier enfant, tandis qu’une modulation des montants de ces allocations serait envisageable pour apporter un soutien plus important aux familles en situation de précarité.

Plus largement, nous voulons sortir d’une vision qui associe la politique familiale aux seules allocations familiales, pour y inclure aussi de nombreuses prestations et leviers. Le développement de solutions de gardes collectives pour les très jeunes enfants, le renforcement de dispositifs d’aide à la parentalité ou encore la réforme du congé parental sont autant d’exemples d’une vision plus large, résolument engagée dans une politique d’aide à la parentalité. Prenons par exemple le congé parental. Certes, les propositions du gouvernement vont dans la bonne direction avec un congé limité à deux ans et demi pour le premier parent et six mois à prendre obligatoirement par le deuxième. Mais là encore, nous devons aller plus loin ! Les écologistes proposent que le congé parental soit transformé en un crédit temps de trois ans réparti nécessairement à part égale entre les deux parents, et cela de manière souple. De même, nous souhaitons un vaste plan d’investissement pour l’ouverture de 400 000 places d’accueil de jeunes enfants. Ces deux propositions permettraient un accompagnement des parents dans leur projet et une plus grande égalité dans la répartition des tâches entre les femmes et les hommes.

Elargir la politique familiale, c’est aussi prendre en compte les transformations de la famille : Explosion du nombre des familles monoparentales (2,2 millions de personnes vivent dans une famille composée d’un adulte avec un ou plusieurs enfants), multiplication des familles homoparentales ou à parentalité multiples (familles recomposées). Ainsi, la sécurisation des liens familiaux existant entre un beau parent et un enfant ou encore la question de la filiation constitue pour nous des points essentiels à une refonte de la politique familiale.

Enfin, les écologistes ont à plusieurs reprises proposé d’individualiser les droits, et notamment ceux liés à la politique familiale. Dans cette perspective, les allocations familiales deviendraient une sorte de « revenu d’autonomie » versé directement aux enfants – et gérés par leurs parents. Cette proposition répond à la très grande précarité des jeunes (plus de 20 % d’entre eux vivent en dessous du seuil de pauvreté) et elle permettrait de garantir leur autonomie, en leur facilitant la possibilité de faire leurs propres choix, comme ceux de continuer leurs études sans avoir la pression constante de savoir comment les financer.

Ces quelques pistes dessinent ce que serait une politique familiale résolument écologiste qui réponde à nos valeurs que sont la justice sociale, l’égalité et l’autonomie.

Jean-Philippe MAGNEN, porte-parole national d’Europe-Ecologie Les Verts

Cyrielle CHATELAIN, responsable du Pôle social d’EELV

David BELLIARD, délégué EELV en charge de la protection sociale